Confidences à Allah

Au fil de mes promenades dans les librairies, j'ai croisé un jour un petit livre dont le titre m'a attirée : Confidences à Allah... je ne connaissais pas l'auteur Saphia Azzedine et je ne savais pas non plus que cette histoire avait été mise en scène au théâtre.

Alors j'ai lu le livre et je suis allée voir la pièce...

Alice Belaïdi est seule sur scène pendant 1h30. On est tenu en haleine par l’histoire de cette bergère Jbara née dans les montagnes du Maghreb dans une famille pauvre. Alors Jbara parle à Allah. Elle lui raconte sa vie, la misère, le mépris, son père ignorant et brutal, les hommes qui la traitent en objet, la découverte progressive du pouvoir de la beauté, la prostitution, la prison…

Jbara est chassée de chez elle par son père parce qu'elle se retrouve enceinte et "déshonore" la famille dans un pays où tout est ‘haram’; L’émotion est à son comble pendant la pièce lorsqu’elle abandonne son bébé. Ou encore lorsqu’elle est abusée par le maître de maison.

Alice Belaïdi est sublime ; elle interprète ce rôle avec beaucoup de justesse et d’énergie ; elle fait tantôt rire, tantôt pleurer. Le décor est minimaliste : une barre verticale qui sert à abriter sa tente dans le désert et qui servira ensuite à aguicher les hommes dans les boites de nuit ; et des pans de tissu noir utilisés aussi bien comme tchador que comme draps ou murs...

Des réflexions sur la sexualité, le voile, la religion, la place de la femme dans la société musulmane.

C’est cru, violent, dur, à la fois dans les textes et dans les actes. On n’en ressort pas indemne…

« Quand je pense à Toi, ma première sensation est celle d’un amour infini. Ni crainte. Ni peur(…) Les hommes T’aiment parce qu’ils Te craignent, ils se tiennent à carreau par peur de l’enfer. Moi je T’aime parce que je suis heureuse de T’aimer. Et que ça m’apaise quand il fait noir. Et il fait souvent noir chez moi. Dedans je veux dire. »

"Ils disent qu'il faut cacher ses ornements afin que l'homme n'ait pas de pensées inavouables. C'est écrit comme ça et ça n'a l'air de déranger personne. C'est lui qui a des pensées inavouables et c'est moi qui dois me cacher. Ca n'a pas de sens."

" Je hais mon voile mais là-dessous je peux pleurer en liberté. Pleurer cette misère à laquelle j'échappe de justesse mais que je côtoie malgré tout. Pleurer cette jeunesse qui me ressemble (...), pleurer ces regards vides qui n'attendent rien. Sauf peut-être qu'un jour vous arriviez à vous mettre à leur place pour comprendre que c'est insoutenable et qu'il faut faire quelquechose. Essayez. Juste une minute. Vous n'y arrivez pas? Essayez encore. Je vais vous aider. Regardez comme c'est chiant d'attendre un bus en retard. Eh bien, imaginez que cette attente dure toute la vie. Vous n'y arrivez toujours pas? Pourtant, nous, on arrive à imaginer votre vie. Facilement en plus."